Le monde est encore à travailler dans les champs. Malgré que le soleil ait dételé depuis une grande heure, il reste encore beaucoup de jour. Sur les aires vides où le marcher est souple dans l'herbe rase, Béatrix, qui mesure sa taille avec ses mains, fait le va-et-vient d'une meule de paille à l'autre, respire les horizons. De quelque côté que l'on se tourne ici, sur cet immense plateau cerné de lointaines collines pâles, les yeux reposent au ciel. Sauf au nord où se pressent de grandes montagnes. C'est là-haut, au fin fond de tout, que sont les Reculas de Marcelle. « Des aires, écrivait-elle dans sa dernière lettre, regardez bien, et si vous voyez une montagne dépassant toutes les autres, c'est celle-là, c'est ce vieux Carcan qui nous prend le soleil. » Dans de lointaines brumes bleues, Béatrix voit se reculer des montagnes émergeant comme de grandes vagues élancées. Celle dont ...
Tout est emprunté, même la vie.