Berthe a quatre ans, Berthe n’est plus la petite plante fanée du début ; finalement assez solide et vive comme quoi Berthe trotte derrière la mère ; une lieue jusqu’à Lisieux ; chaque samedi matin, elles vont sur le marché vendre un panier d’œufs, une canne de lait, une motte de beurre le marché grouillant bêlant puant pissant, le marché où tournent depuis l’aube, sur des lits de braises de gras moutons parfumés au genièvre ; le marché où des futailles mousse un cidre orange et si vous en répandez sur la table, frottez-vous-en la tête, ça porte chance ! ce n’est pas que ça rapporte beaucoup le lait le beurre et les œufs ; le beurre c’est moins que l’huile pardi ; c’est quasi rien mais le peu que ça paie, ça permet à la mère de rapporter du fil, des chandelles, du son pour les canards ; si ça se peut des galettes, si ça se peut du lard Berthe trotte, ne lâche pas la pogne de la mère chaude le marché, après une heure de marche à travers la campagne gelée la campagne craquan...
Tout est emprunté, même la vie.