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Affichage des articles associés au libellé Ivan Illich

Lux et lumen

« L'hésitation du regard occidental devant l'image [...] est une constante qui survit à une inversion majeure de la vision au cours de la même période [9è et 10è siècles]. L'histoire commence avec al-Haytham (Alhazen, en latin, vers 965-1039), qui, comme les deux autres grands opticiens avant lui, Euclide et Ptolémée, était citoyen d'Alexandrie. D'après une légende, c'était un mathématicien si réputé que le sultan attendait de lui qu'il régulât le Nil. Ayant compris la vanité d'une telle entreprise, il s'éloigna de la cour et créa pour lui même un "instrument" lui permettant d'étudier l'éclipse de soleil qu'il avait prédite. Voici comment il procéda : il se servit d'un tombeau égyptien comme camera obscura . En perçant un minuscule trou, il produisit sur le mur du fond de la chambre noire une image du soleil qu'il pouvait regarder sans être aveuglé. Ce qui fait de lui un révolutionnaire, ce n'est pas l'usage ...

Libido videndi

Dans son chapitre Libido videndi , Ivan Illich en vient à présenter le travail de François Boespflug : « La conception antique du regard se révéla insuffisante pour relever un défi intellectuel de la fin de l'Antiquité byzantine, un événement contemporain des Mérovingiens en Occident. Le problème était celui de la différence entre l' emphasis et un artefact, à savoir l'icône. Les présocratiques avaient cultivé l'irrespect ( dis-regard ) envers les dieux afin de focaliser leur esprit sur le concept d'entités. Ainsi les sculptures n'étaient plus considérées comme des dieux, mais comme des symboles de l'invisible, des divinités ou des forces qu'elles représentaient. Les chrétiens initièrent une forme d'hésitation nouvelle face à l'image sculptée. Leur ambivalence procédait de leur foi. Jésus, la Parole de Dieu faite chair, avait été appelé dès les tout débuts l'Image du Père. Le fils de Marie, le charpentier de Nazareth, était à part égale D...

Le temps du regard

Extrait d'une conférence qu'Ivan Illich consacre en 1995 à l'histoire du regard. Il fait allusion à une thèse de l’helléniste Gérard Simon : « Pour ce dernier, l'optique antique a pour objet un effluve de la pupille, un rayon qui trouve son origine dans l’œil, et ne traite au mieux que tangentiellement de la lumière, laquelle est elle-même conçue comme une émanation de l’œil céleste, un rayon venant du soleil, de la face d'Hélios. Tout le mérite d'Euclide est d'avoir donné une forme géométrique au regard humain, décrivant cet effluve comme une figure conique qui a son sommet dans la pupille et sa base sur l'objet que le regard embrasse. Tous les opticiens de l'Antiquité s'intéressent à ce qui se passe à la base du cône visuel, là où il s'attache à son objet. Ils conviennent que quelque chose, à la surface de l'objet, se mêle au rayon émis par l’œil. De quoi s'agit-il ? C'est la couleur. La couleur comme une qualité de l'o...

"Dropout", recalé

« La moitié des enfants qui entrent à l'école publique à Chicago échouent avant la fin du lycée. Dans le monde, les trois quarts des enfants inscrits à l'école primaire n'atteignent jamais le niveau que la loi de leur pays définit comme le minimum obligatoire. L'institution tenue pour sacrée crée et légitime un monde où la grande majorité des individus sont stigmatisés comme recalés tandis qu'une minorité seulement sortent de ces institutions avec en poche un diplôme qui certifie leur appartenance à une super-race qui a le droit de gouverner. La fonction insidieuse de la scolarisation est évidente, mais voici deux décennies maintenant qu'elle a été reconnue comme telle. Elle attire périodiquement l'attention, comme actuellement en Illinois. Mais on en discute systématiquement du point de vue des employés de la fourrière, qu'il s'agisse de la direction des établissements, des associations de parents d'élèves et d'enseignants ou des service...