En 1859, il avait engagé dans son atelier du 38, rue de la Victoire un garçon d’une quinzaine d’années, Alexandre, qui vivait dans une quasi-misère, non loin de chez lui. Manet lui demandait de laver ses pinceaux, de balayer, de nettoyer les lieux. Il le prit incidemment comme modèle pour son Enfant aux cerises de 1859, où il semble respirer l’innocence et le bonheur de vivre, avec ses yeux malicieux sous sa toque rouge, ses cheveux blonds, son nez un peu épaté, sa bouche gourmande, ses mains qui enserrent précieusement le sac de cerises posé sur un muret auquel il s’est lui-même appuyé… Mais cette innocence, cette joie de vivre n’étaient sans doute qu’une illusion. Le plus souvent, l’enfant était ombrageux, taciturne. Il commettait de menus vols. Faut-il penser qu’un jour de l’été 1860 Manet se mit plus violemment que d’habitude en colère contre lui ? On a souligné à quel point il arrivait au peintre de se laisser emporter par ses ressentiments avant de recouvrer la maîtrise ...
Tout est emprunté, même la vie.