Ce sont des couleurs ou ce sont des lieux, des objets, des personnes : ce sont des mots qui vont permettre de dire, de transmettre une histoire.
« Raconter, » écrit Jean Hatzfeld dans la 3e page du livre, « c'est à un moment chercher des plots d'ancrage où arrimer le récit. Sauf cette maison abandonnée dans un champ de haricots, il est difficile d'en trouver pour Isidore depuis la mort de sa femme et l'exil de son fils. Pas de tombe, aucune marque ni inscription nulle part, que ce soit sur le monumental mur aux Victimes érigé sur un monticule au-dessus des marais, ou au mémorial, pas même au cimetière. Zéro trace de témoignages aux procès après le génocide, aucune allusion lors des procès gaçaça qui se sont tenus plus tard entre 2002 et 2006 dans cette région. Mais plus perturbante encore est la mauvaise volonté des anciens voisins. »
Ce sont seulement les récits qui restent, qui peuvent se perpétuer. Les vies s'éteignent. Seuls les récits peuvent raviver les couleurs du monde.
Photographie de Anne Nouwynck
Là où tout se tait, de Jean Hatzfeld, Gallimard 2021
Commentaires
Enregistrer un commentaire