Le tout-monde Tout un monde Tout le monde
Il faut de tout pour faire un monde reste mon expression préférée — celle que j'ai entendue de ma mère, qu'elle nous disait souvent peut-être. Ce qu'elle disait venait toujours de profond, même les choses apparemment banales, je ne crois pas avoir connu cela à ce point chez d'autres personnes. Elle écrivait de même. Mon père — qui écrivait bien, mais peu, comme elle, leur vie de modestes travailleurs ne leur en ayant pas trop donné l'occasion — lorsqu'elle admirait ce talent caché qu'il avait d'écrire en cachette des pages magnifiques qu'il nous lisait ensuite, mon père lui disait : oui, mais toi tu écris avec ton coeur. La profondeur de parole comme d'écriture de ma mère était un bienfait inégalé. Il lui venait de son enfance, de ses parents et de plus loin sans doute, de cette écoute et de cet amour du monde qu'ils avaient. Maintenant, il est en moi, indéracinable, grâce à eux et à mon enfance.
Lorsque j'ai vécu en Martinique, lorsque je sens les effluves du jasmin posé en ce moment sur la table, que par la fenêtre ouverte dans l'air doux du matin m'arrivent les cris des martinets, le moulin des cigales, les ailes des pigeons qui claquent, c'est cet enracinement profond que j'ai trouvé et que je vis, ainsi que les plantes plongent leurs racines dans la terre comme de fins cheveux et comme des branches, nous sommes ensemble accrochés à elle — à nos souvenirs, nos enfantements, à notre humanité — à cette Terre où nous puisons nos élans infinis. Accrochés sur la boule tous ensemble et tous aux antipodes de quelqu'un. Car il faut de tous pour faire cet ensemble qu'est le monde. Et de tout pour le respirer, s'en nourrir, s'en réjouir. C'est de cette mondialité dont parle Edouard Glissant, ses orteils dans le même tout-monde. Que je sois à la Martinique, dans les Alpes ou dans la Drôme, sur l'océan frais, je ressens toujours la même infinie richesse.
Ce livre m'a parlé de ça : Les antipodes.
Offrons-le à nos enfants.
Les antipodes, Guillaume Guéraud, Bertrand Dubois, Editions Notari, Genève, 2013
Il faut de tout pour faire un monde reste mon expression préférée — celle que j'ai entendue de ma mère, qu'elle nous disait souvent peut-être. Ce qu'elle disait venait toujours de profond, même les choses apparemment banales, je ne crois pas avoir connu cela à ce point chez d'autres personnes. Elle écrivait de même. Mon père — qui écrivait bien, mais peu, comme elle, leur vie de modestes travailleurs ne leur en ayant pas trop donné l'occasion — lorsqu'elle admirait ce talent caché qu'il avait d'écrire en cachette des pages magnifiques qu'il nous lisait ensuite, mon père lui disait : oui, mais toi tu écris avec ton coeur. La profondeur de parole comme d'écriture de ma mère était un bienfait inégalé. Il lui venait de son enfance, de ses parents et de plus loin sans doute, de cette écoute et de cet amour du monde qu'ils avaient. Maintenant, il est en moi, indéracinable, grâce à eux et à mon enfance.
Lorsque j'ai vécu en Martinique, lorsque je sens les effluves du jasmin posé en ce moment sur la table, que par la fenêtre ouverte dans l'air doux du matin m'arrivent les cris des martinets, le moulin des cigales, les ailes des pigeons qui claquent, c'est cet enracinement profond que j'ai trouvé et que je vis, ainsi que les plantes plongent leurs racines dans la terre comme de fins cheveux et comme des branches, nous sommes ensemble accrochés à elle — à nos souvenirs, nos enfantements, à notre humanité — à cette Terre où nous puisons nos élans infinis. Accrochés sur la boule tous ensemble et tous aux antipodes de quelqu'un. Car il faut de tous pour faire cet ensemble qu'est le monde. Et de tout pour le respirer, s'en nourrir, s'en réjouir. C'est de cette mondialité dont parle Edouard Glissant, ses orteils dans le même tout-monde. Que je sois à la Martinique, dans les Alpes ou dans la Drôme, sur l'océan frais, je ressens toujours la même infinie richesse.
Ce livre m'a parlé de ça : Les antipodes.
Offrons-le à nos enfants.
Les antipodes, Guillaume Guéraud, Bertrand Dubois, Editions Notari, Genève, 2013
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