Mais la plante en nous vit sans souci, elle est attentive aux beaux jours, au soleil, à la sève qui monte, aux fleurs qui s'épanouissent, et aussi aux bourgeons...
L'animal en nous tremble contre son gré...
Mais la plante pousse tous les jours sans angoisse, sans remords elle étend ses feuilles et ses racines. Tous les jours elle étend ses racines, elle ne craint rien, elle se nourrit de la terre et de la lumière.
L'animal crie en nous, il s'affole pour rien, il sort ses griffes quand ce n'est pas nécessaire et se perd en agressivité.
L'animal pleure en nous pendant que la plante concentre ses potentialités dans la sagesse...
Nicole Chaabi, le début de "Un bain de jouvence" ed. Gaspard Nocturne
Un peu plus loin :
Mais le mammifère est là, tapi dans l'ombre, insaisissable, mécontent, omniprésent. Il a faim, il a soif. Il est roi, il ne tolère pas le végétal silencieux, il l'écrase, il le grignote. Cet animal est lourdaud, il se sert de la vie pour engraisser inconsidérément, il se sert de la mort des plantes pour grossir sans mesure.
Il s'agite, il tord le ventre et l'estomac. Il se fend la tête et se trouble l'esprit. Il se tortille, il frétille, il ouvre sa gueul, il menace, il grogne, il aboie. Cet animal veut toute la place, il est dominateur, il veut toute la puissance et regarde avec condescendance cette pauvre plante qui s'est trompée de lieu de naissance.
Il est toute la puissance mais il est aussi toutes les souffrances. Comment ne souffrirait-il pas de ne pas être plus grand, plus fort, plus puissant ? Combien veut-il de sujets sous ses ordres, combien veut-il d'esclaves sous son commandement ?
Qui veut-il commander ? Il croit qu'il peut faire plier le monde entier ! N'est-il pas le plus beau, le plus grand, le plus intelligent, le plus malin, mais il n'est qu'un chien qui a une vue bornée comme tous les chiens...
Nicole Chaabi, un bain de jouvence.
photo r.t
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