Cet
hiver-là, la neige délirait bonnement sous un ciel d’étain. Poudrant
chaque branche, chaque herbe ; mûrissant toutes ses magies. Et il me
semblait que les malades aussi, même les plus dolents, même les plus
amers, même les plus tristes, étaient distraits. Comme réconciliés de
tant de bijouterie, de calme, de silence : ce tombé blanc, cette carole.
Et elle tombait, elle tombait, la neige. Oui, plus personne n’avait sa
voix de bile et les salles de l’hôtel-Dieu, moelleuses comme un œuf, ne
résonnaient plus des plaintes, des râles. En tout cas, une certaine paix
régnait, je crois.
Ma Dame,
j’étais heureux, car Chauliac m’avait
appris à réduire les fractures, en usant d’une voie nouvelle. Avec des
bandes de lin mouillées de blanc d’œuf, sur un cataplasme de feuilles de
consoude ; le tout mis sur la brisure ; ça on savait. Mais la
nouveauté, c’est que pour éviter que l’os ne soit ressoudé de travers,
l’os de la jambe, par exemple, il fallait le maintenir en l’air, libéré
de son poids de chair ; ce qui accélère d’autant la couture. Chauliac
lui-même avait confectionné tout un corps de poulies et de cordes pour
maintenir les fémurs rompus.
Les maîtres sorbonnards avaient beau
moquer et condamner ces nouvelles façons, n’empêche qu’on venait de loin
pour se faire panser.
Se déprendre des textes, des enseignements théoriques pour observer le malade. Partir du sensible, d’abord ; me disait-il.
Chauliac est un grand maître.
Et puis il y a eu cette affreuse peste.
Isabelle Pouchin, Le Médecin d'Avignon, p.82
Peinture, Bruegel L'ancien
Ernst Zürcher marche. C'est peut-être même l'objet de ce petit livre. Son cheminement se fait à égale distance de la science et de la poésie. A peine métaphorique, son langage (dans l'extrait ci-dessous) s'emploie à montrer la pulsation des forces de vie dans le végétal. Ses observations font intervenir des notions comme l'attraction gravitationnelle ou la résonance électromagnétique. D'autres fois le texte se fait plus poétique et le point de vue peut apparaître plus anthropocentré. Mais l'auteur semble attentif à maintenir le cap de l'observation et le langage de la rationalité. L'une des caractéristiques du monde organique réside dans l'aspect rythmique de nombreux processus de croissance et des structures qui en résultent. Cet aspect se révèle d'abord par une alternance d'activité intense et de repos apparent. Dans le cas des arbres, nous observons de tels rythmes en relation avec le cycle des saisons, dans la succession des stade...
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