Quand elle commença à grimper sur le prunier, nous la suivîmes. L'arbre ne semblait pas assez gros pour supporter le poids de cinq personnes, mais nous nous aperçûmes bientôt qu'il grandissait et grossissait à mesure que nous grimpions. Quand nous nous arrêtâmes à quelques mètres du sol, il cessa de pousser. Quand nous reprîmes notre ascension, il fit de même. Nous grimpâmes encore et encore jusqu'à dépasser les nuages. Nous pouvions voir la Terre tout là-bas. Nous restâmes immobiles et l'arbre fit de même. Nous regardâmes en bas. Nous regardâmes la Terre, avec ses forêts, ses océans, ses montagnes et ses nuages ; avec ses pays, ses frontières, ses peuples, leurs amours et leurs haines, ses meurtres et ses pillages. Nous nous regardâmes et nous comprîmes qu'il nous serait facile de laisser tout cela derrière nous. Nous continuâmes à monter jusqu'à ce que nous arrivions tout en haut de l'arbre. Maman, qui était en tête, se retourna et nous observa l'un après l'autre, puis elle sourit et disparut, absorbée par l'écorce de l'arbre. Papa disparut à son tour, puis Sohrab, Beeta et moi aussi.
Shokoofeh Azar, Quand s'illumine le prunier sauvage, traduit de l'anglais, après l'original en farsi.
Extrait de la présentation du roman par l'éditeur :
"1979. La révolution islamique gronde à Téhéran. Une des plus vieilles monarchies du monde tombe pour le régime répressif de Khomeiny.
Contraints
de fuir la capitale, Hushang, Roza et leurs trois enfants tentent de
reconstruire leur vie dans le petit village reculé de Razan, au cœur de
la région montagneuse de Mazandéran. Malgré la terreur, malgré les âmes
des martyrs de la révolution qui rôdent en attendant l'heure de la
vengeance, malgré la tempête de neige noire, la forêt où poussent les
pruniers sauvages offre un refuge aux espoirs et aux rêves de liberté."
Photographie de Jeanne Carasso
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