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Affichage des articles du mars, 2019

Et en même temps, dans Paris...

 « Nous sommes arrivés ce samedi 16 mars sur la place de l’étoile, par le métro, à la montée des marches on sentait déjà les gaz alors qu’il était à peine 10h du matin... Je pense que tout était prévu pour que ça dégénère. Pour commencer à avoir l’habitude des manifestations sur Paris, des contrôles à répétition, des fouilles où on nous enlève tout, même du sérum phy, ce jour-là, jour annoncé comme LE jour, rien ! Aux alentours de 15h30, alors que nous voulions rejoindre le cortège que nous avions quitté avec mes amis pour aller manger, nous nous sommes fait arrêter par une brigade à moto avec quatre de mes amis. Alors que mes amis traversaient la rue, j’ai vu un motard mettre en route sa sirène et les montrer du doigt. Dès ce moment-là, j’ai compris qu’ils allaient se faire arrêter, j’ai couru pour les rejoindre et voir ce qu’il se passait. Une quinzaine de policier s’est rapprochée de nous, autant vous dire qu’on ne brillait pas, mais nous étions loin d’imaginer jusqu’où cela ir

Initiation

Sow amarre solidement l’outre pleine d’eau et la cale juste à côté du sac en jute qui contient les provision des deux pisteurs engagés hier par Pierre D. (je n’inscris pas son nom en entier car je crois qu’il est à ce jour conservateur d’un immense parc national en Afrique de l’Ouest.) Les provisions ! du singe boucané, du riz, de la farine à foufou, l’eau est dans la peau de chèvre, et dans nos gourdes aussi. Nous allons quitter Niamey pour Zinder, Maradi, puis la brousse, c’est un reportage pour moi et la revue Balafon, pour Pierre… son rendez-vous avec les crocodiles du fleuve Niger. Je ne suis en Afrique que depuis un an, je ne sais pas encore que je vais y passer un peu plus d’un tiers de ma vie, que cette terre entrera en moi à jamais et que son empreinte sur mon cœur sera le signe magique, le détonateur de toutes mes folles énergies à venir. La première nuit en brousse n’est pas vraiment totalement rassurante. Je dors sur le toit de la Land Rover, les hommes ont fait du feu

L'arbre

Ce qui me fascine dans l’arbre… Dans la nature d’un arbre il y a toutes les nécessités de la vie, il y a la nécessité du temps, de l’espace, de la lumière, de l’eau, du mouvement, de la métamorphose… il y a aussi la nécessité de l’unité et la nécessité de la division. Ce qui me fascine dans l’arbre c’est qu’il est l’univers de l’univers, la nécessité de la nécessité. Monsif Ouadai Saleh

Léontine

La Land est chargée, le chauffeur est prêt. Après onze jours de reportage, repérages à travers la verte Casamance et le fier peuple Diolla, il est temps de rentrer à Dakar. Nous allons traverser six cents kilomètres de terres arides ; adieu oasis magique, chants mandingues si doux, et bonjour latérite rouge et poussière, baobabs gris, villages secs. A Sindhiot, une jeune femme nous demande un passage, elle est accompagnée de deux enfants, dont une petite fille qui tient un bébé cochon noir dans ses bras. Ce sont des N’diolla (Mandingues), une ethnie fantastique, pratiquant l’initiation à la connaissance du bois sacré, cette chevalerie africaine d’où sortent des hommes courageux, loyaux, endurants et… un peu plus… mystiquement… savants ! Assiatou a une vingtaine d’années, elle va aider sa tante à Dakar, avec son petit frère et sa petite sœur. Quand nous acceptons de les emmener, la petite fille dépose le petit cochon sur mes genoux en me disant « Tiens, c’est pour toi ! » Je garde

La femme griffée

Il est autour de midi. En brousse, c’est l’heure où tout s’immobilise, bêtes et gens subissent l’implacable loi du soleil, sa lumière écrasante, ses morsures cuisantes. Plus aucun mouvement, comme si tout ce qui vit s’arrêtait, juste une palpitation, unique, celle de l’animal ou de l’homme qui cherche l’ombre. Seuls les singes de M. Paul, inlassables, trouvent assez d’énergie pour leurs disputes bruyantes. M. Paul c’est ce vieux gangster repenti qui a ouvert depuis dix ans, sans autorisation, un camp de chasse en pleine brousse. Il aime l’Afrique, M. Paul, enfin… son Afrique ! Derrière le comptoir en bois d’agoné, Dialo, le serveur à tout faire, rince et essuie les verres, les yeux rougis de yamba. Sur une chaise, une blonde décolorée, opulente, boudinée dans un bustier bleu un peu fané, pose du vernis sur ses ongles en houspillant Dialo pour sa lenteur. Aujourd’hui, viennent du campement les amis de M. Paul, avec leurs compagnes. La grosse blonde impatiente, c’est Mado, la « fem

Alcoolo blues

Un sanglot d’angoisse s’échappa de sa gorge… Rentrer chez elle… C’était où ? Il lui faudrait refaire à l’envers l’immense voyage qui l’avait finalement jetée sur le lit d’hôtel douteux. Elle sortit. La nuit soudainement tombée lui jeta les miroitements des cafés ouverts ça et là, sortes de cavernes dorées agrandies par d’immenses miroirs. La soif montait en elle, volcan, sécheresse, désir de tout son être. Elle ne tremblait pas encore. Cela viendrait plus tard et sournoisement. Elle détestait cette pauvreté qui la rendait pantelante, harassée et hardie. Elle entra dans le bar le plus tamisé, celui où l’orange et le piano adoucissaient son désarroi. C’était exactement la même impression qu’elle avait éprouvée quinze ans auparavant en Sardaigne… Lâchée à la frontière, elle s’était retrouvée seule, séparée de la communauté créative… Les années aux fleurs dans les cheveux ! Elle traversa la brasserie pleine de gens bourdonnants, ce soudain bruit, ce ronronnement humain qui donnait l’

De ma fenêtre

C’était un après-midi d’août terriblement électrisé par des orages avortés, griffant le ciel de traînées menaçantes qui n’arrivaient pas à exploser. De ma fenêtre, du haut de mes treize étages, je voyais, à l’intersection des quatre chemins, une femme brune, habillée de couleurs d’été, montant péniblement la côte qui longe le parc désert à cette heure trop chaude. La femme était étrangère, et plus elle se rapprochait de ma vision, plus j’en concluais qu’elle était d’ailleurs ; son teint avait la couleur des mangues mûres et une longue natte de cheveux noirs bleutés battait ses reins à chacun de ses pas. Soudain, surgi d’on ne sait où, un groupe de cinq enfants apparut. Les plus grands fermaient cette marche joyeuse, les trois autres, armés de bâtons, provoquaient le ciel en faisant des signes sans doute codés, apostrophant les nuages, fendant les rayons du soleil revenu. Ce chant actif dans cet engourdissement de chaleur arrêta la femme qui déposa son lourd paquet à terre ; elle le

Où ?

La mère enveloppe l'enfant  contre elle et ils sortent Le froid de l'hiver La femme L'homme L'adolescent Le bœuf, l'âne, le loup Bientôt le ciel scintille   Statue-menhir (dite) "Dame de Saint-Sernin" (3500 à 2000 av. J.-C.) Musée Fenaille à Rodez Poème r.t